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1. Qu’est-ce que la danse ?

L’art chorégraphique suppose de remettre en jeu beaucoup de nos habitudes de spectateur, tant on se tromperait gravement à regarder de la danse soit comme du théâtre soit comme un tableau ou une œuvre plastique. La danse n’a rien d’autre à promettre que d’être la danse. Le spectateur ne peut l’approcher qu’à la tenir pour ce qu’elle est, soit de la danse; s’il y cherche les émotions du texte ou du chant, il est déçu et c’est dommage… D’où l’importance de savoir de quoi il s’agit.

2. Qu’est-ce qu’un chorégraphe ?

Chacun de nous est mû par la pulsion de danse: il ne devrait pas y avoir de chorégraphe. N’importe quel créateur pourrait laisser libre cours à sa sensibilité à la danse et l’insérer au sein d’œuvres qui n’auraient pas besoin d’autres désignations que théâtre, comédie musicale, opéra ou autre. En somme, le chorégraphe ne devrait pas exister quand la réalité du monde du spectacle témoigne que si ! Donc, il doit y avoir quelque chose de spécifique dans ce créateur et qui n’appartient qu’à lui. La logique est imparable, la réalité plus fugace !

3. Qu’est-ce qu’un danseur ?

Quelle que soit la technique, le danseur s’impose. Il est superbe, subjuguant. On en a le souffle coupé. Il fait oublier le réel à force d’y être incontournable. Pourtant, définir sa nature représente un objectif très conséquent. Car la figure du danseur toujours s’échappe. La question n’est pas de technique ou de savoir, mais de nature : si tout le monde danse, tout le monde n’est pas danseur et si le problème s’épaissit, le danseur non, c’est la norme ! Car une instance est censée conformer les corps, les assujettir à la norme du danseur : le cours de danse.

4. Quel sens a la danse ?

C’est une petite phrase que l’on entend très fréquemment à la sortie des spectacles : « Je ne comprends rien à la danse, mais… » Il n’y a aucune moquerie dans cette citation volée à « monsieur tout le monde ». Au contraire, elle souligne combien l’œuvre chorégraphique diffère des autres formes du spectacle : il n’est pas nécessaire d’avoir compris l’œuvre dansée pour l’apprécier. Mais est-ce à dire que toute œuvre chorégraphique est privée de sens ? Et comment le spectateur reçoit-il cette œuvre, surtout s’il ne fait pas de danse lui-même, tant une conviction voudrait qu’il faille pratiquer pour comprendre…

5. Peut-on écrire la danse ?

Une œuvre dansée ou un mouvement se voient souvent qualifiés de « très écrits ». Pourtant, la question est désormais bien balisée : pour clarifier d’emblée, la danse n’étant pas une langue, elle ne peut être écrite, en revanche, elle se note, ce qui n’est pas du tout pareil. Noter suppose un système graphique qui traduit l’apparence et non la nature de la danse, et il en existe plusieurs et depuis longtemps. Mais l’usage permanent des termes  » écriture » ou « vocabulaire » pour un art qui n’en a pas besoin témoigne d’une obsession qui n’est pas sans conséquence, en particulier en matière de mémoire et de culture.

Cote :792.82 V554r v.1-5


Source: Rosalie Méthot, Bibliothèque